Lift, pour vous le présenter, c’est à la fois une experience festive et studieuse. Le cadre et le contexte sont somptueux. L’organisation fluide, discrète et souriante des volontaires est très agréable. Lift, c’est aussi des événements; un diner de Gala, véritable expérience artistique surprise, a animé la soirée qui avait bien débuté par l’organisation d’un tremblement de terre à la sonorité étrange par les Fifters (Lift+Fing). Le Lift expérience est complété par ce que Marseille a de plus sympathique à offrir: soirées sur le vieux port avec les Minots.
Apres le contexte festif, voici les quelques idées que je retiens de ce cru 2011.
Les journées de Lift-Fing Marseille accélèrent les réflexions, les émergences et les enjeux à explorer pour le monde que nous voulons construire.
LiftFing : Consolidation
Un ensemble de thèmes récurrents étaient présents à Lift: open, slow,etc… je retiendrais l’utilisation et le potentiel social des technologies qui est toujours à valoriser. l’Open (l’ouverture comme mode de pensée) peut être désormais qualifié de « mainstream ». On peut ainsi presque parler de SurOpeness ou D’Openobesité dans les réflexions du moment. Le Quoi, le pourquoi, pour qui et dans quel contexte sont les questions qui donneront corps aux changements des rapports entre les hommes, les technologies et les biens communs. D’autre part, je crois que l’on peut ouvrir ce qui est transformable et cultivable, mais peu les choses finis ou intransformables.
Les interrogations sur les usages et la nature des services inscrits dans l’époque sont encore et toujours nécessaires à explorer. Ils sont présents à Lift et nous avons encore du travail pour expliquer aux « entreprises », aux «citoyens » et aux « hommes politiques » que le siècle est nouveau. La pédagogie reste donc présente à Lift. Des économistes, marqueteurs, innovateurs de business modèle sociaux pourraient peut être compléter le plateau.
Les nouvelles conditions et formes d’émergences des innovations sont à rappeler. Ainsi une envolée sur Twitter à révéler l’intérêt d’une partie de la salle pour le livre Democrating innovation d’Eric Von Hippel.
Beaucoup de projets reposent désormais sur l’application du principe d’ouverture à peu près tout et à une sorte d’obligation à l’aplatissement des organisations. Nous sommes donc dans une période de déploiement, parfois idéologique, et de « modélisation » de ce principe à toujours plus de secteurs. Ce qui n’est pas toujours forcement radical.
Ce Lift a donc été un Lift de consolidation, de maturité et de premier bilan des nouvelles formes de l’innovation ou plutôt comme je le crois une réelle démocratisation de ces idées dont il est bon de rappeler les fondamentaux et les buts.
LiftFing: DifferenceCulturelle
La langue anglaise a ses charmes, auxquelles la langue française ne rend pas toujours justice.
Il existe un brouillage sémantique et systématique en France entre le mot « Design » utilisé dans la langue anglaise qui veut dire conception et design dans la langue française qui veut dire « création industriel (Dessin et dessein)». Ce Design que je pratique, se dit Gestaltung en allemand ou projetazzione en italien. En anglais, on le nomme « Industrial design » Nous parlons d’approche, de création, de sensibilité et de proposition de solution alors que la « conception » nous parle de process et de résolution de problème….
Cela entraine parfois des confusions sur les propos des débats.
Ainsi, quand les Anglo-Saxons défient les producteurs de technologie, les entreprises et les organisations avec l’open design , ou le lowtech mouvement . Les français défis le design et les designers qui compte tenu de leur faible pouvoir d’action n’en demande pas temps.
Cette confusion brouille les objectifs et évitent de se concentrer sur les mutations : sociales, industrielles, marchandes, marketing et donc sur les nouvelles émergences crédibles de l’innovation. Ce quiproquos sémantique gomme la dimension usage, esthétique, culturelle, sensible et unique de la création industrielle appliquée aux objets contemporains.
LiftFing:Stimulation
Les présentations d’Adam Greenfield sur la ville interrogent le statut d’intérêt des objets publics ouverts. Adam propose une raison et une nature à cette ouverture. L’urbanisme numérique repose sur l’enjeu de ne pas laisser seuls propositions d’IBM ou Cisco sur la ville mesurée (Smart cities) et proposer des visons de « networked cities », de villes numériques, de villes informées/informantes et de villes relationnelles centrées sur des usages sociaux et « humains » faisant « urbanité ». La ville numérique, ce «vieux» projet de la Fing Ville 2.0 reste d’actualité au regard des questions posées par le Grand Paris et du temps long de l’urbanisme.
Robin Chase nous introduit son projet BuzzCar de partage de son véhicule, mais aussi le rôle de l’internet dans la mutation, l’optimisation, la fluidification et le partage de ses biens personnels. On peut ainsi parler de transformation de biens personnels en éléments d’infrastructure AdHoc.
Elle introduit également dans sa présentation pour qualifier les nouveaux espaces d’innovations la notion de PicNic; un espace à usage connu, à la localisation spontanée et dont l’usage et la socialité sont attractifs
Elle complète la notion que nous avions introduit l’année dernière de « place du marché », un espace connu aux situations connues et imprévisible et où tout peut arriver dans un cadre socialement adapté et culturel.
L’enjeu des métaphores de « place du Marché « ou du « PicNic » est d’inventer les espaces « plausibles » d’innovations économiquement viables entre modèles du Bazar (limité et aculturel) et de la cathédrale (fini et d’un autre temps mais culturel). Comme le dit Nicolas Nova, dans un Tweet: Open innovation doesnt mean anarchy, leadership is needed, tutoring as tell.
PatientsLikeMe, présenté par Paul Wicks propose aux internautes de renseigner leurs symptômes, traitement en ligne… L’idée radicale, est se situer et d’échanger et d’extraire des données anonymes qui remonte des études ou données clinique. Après la ville sensible, le corps social mesuré, c’est donc le corps physique et la santé qui sont mesurés et améliorés. PatientLikeme permet un engagement face à sa maladie.
Une discussion avec Tobbie Kerridge, qui présentait le projet Material Beliefs http://www.materialbeliefs.com/ a compléter la séance sur le corps, la santé et le numérique. Il serai, peut-êtret intéressant en France d’intégrer ces réflexions au Dossier médical partagé?
LiftFing:Les Nouveaux Artisants Jonathan Kuniholm qui est ingenieur pointe les oublis de l’industrie sur la production de prothèse pour réparer l’homme. Ce sujet pourtant abondamment traité dans les labos scientifiques français notamment est laissé en jachère par les industriels. Couteux, séries faibles, trop personnel et spécifique, toutes les raisons sont bonnes pour ne pas proposer ces produits essentiels. Jonathan pointe l’intérêt d’utiliser des objets de série, des technologies accessibles pour les transformer en produits ou services en extensions ou en remplacement du corps. Son propos factuel, précis, discret met l’objet des fablabs dans un contexte fondamental, essentiel et intéressant relevant du nouvel artisanat du XXI siècle et d’un rôle économique crédible.
Kris de Decker de Low Tech Magazine et No Tech Magazine nous rappelle que la technologie comme seul vecteur de progrès n’est pas la seule voie. L’obsolescence programmée, la nécessité de renouveler artificiellement les produits, le potentiel prétendument infini des technos et les nécessités de gain de productivité (marge arrière pour des produits à coûts constants) obligent à ces changements techniques permanents pour des raisons parfois éloignées de l’essentiel et des hommes. De vieilles solutions ou technologies peuvent ainsi créer des opportunités intéressantes.
Un FabLab gagnerait par exemple également à acheter un tour ou une fraiseuse mécanique au poids du métal en complément d’une ReRap qui ne fonctionne pas toujours ;=). Ces machines offrent une valeur d’usage identique depuis leur création, ce qui n’est pas le cas de l’ordinateur. Le tour n’émancipe pas les gens facilement (difficile à apprendre) mais valorise les savoirs personnels et les valeurs d’apprentissages. Le résultat est un « langage » qui permet les conceptions et des créations fines. Kris appelle à l’efficience et à l’élégance des solutions adaptées à un contexte. Vers le MixTechnology: nouvelles machines+vieilles machines+nouveaux savoirs faire+vieux savoir faire et nouveaux objets ?
LiftFing:SoryTelling vs Design
L’injonction à innover, à ouvrir, à être créatif, à être émancipé, à programmer, a faire du DIY est saisissante. Ce storytelling militant est parfois caricatural. On tape sur les gros « I’m getting sick of these top-down designed smart homes ». Mais on est financé par eux…
On dit que les grosses compagnies ne font pas du bon boulot, cela est peut-être véridique pour certaines, mais d’autres proposent des produits « adéquates », « utiles »et « désirables ». Au dela du truc de conférencier, la plupart de ces fictions produisent des caricatures aussi fortes que celle qu’elles prétendent dénoncer. On souhaite absolument croire que les vraies gens puissent faire eux-mêmes ce dont ils ont besoin et le donner gratuitement, tout en étant payer pour cela. Peut-être tout cela est-il plus subtile ? Il y a dans ce type de démarche (HomeSense, TeamBuilding) la distance entre « Sense and Sensibility* », entre la raison et la sensibilité ou entre la mesure et l’esthétique, entre l’histoire et la réalité, entre les parties et le tout. Un objet humain doit exprimer une sensibilité, et une inscription culturelle partageable dans un langage commun. Cette fiction n’est pas notre Design. Il me semble que des approches plus réelles, contextuelles, économiques, culturelles et inscrites dans la légitimité des choses et des gens soient beaucoup plus intéressantes. Un designer n’est ni un docteur, ni un psychologue, et encore moins un publicitaire.
La fiction du Storytelling va-elle tuer la réalité de nos convictions et du Design ?
*(Hommage à Jane Austen ;=))
LiftFing:Best of Show
Le formidable Workshop sur la monnaie organisée par l’expédition Monnaie complémentaire de la Fing et animée par Jean Michel Cornu reste la plongée et l’échange riche et stimulant de ce Lift 2011.
LiftFing:expériences, fraicheur et Made in Gaulle.
L’architecte énergique Alain Renk avec UFO, le graphiste/chercheur Geoffrey Dorne et La ruche qui dit oui sont des exemples de propositions imaginées en France. Les projets de Lift Expérience sont vraiment intéressants: les démos d’asso-bug:le Jardin des savoirs dont je suis Fan, Tomette 2013, Le poisson-Pilote, HackableDevice, le voyage dans Rennes, et les projets d’objets issus d’Atelier de l’Ensci, etc…..
LiftFing:rencontres
Norbert, Philippe M, Philippe G, Ana, Adam, Robin, Norbert, Licia, Xavier, Hubert, Jean Michel, Denis, Pierre, Jacques-François, Xavier, Thierry, Amandine, Veronique, Jean-Marie, Tobie, Axelle, Phil, Florence, Matt, Jean-Michel, Nicolas, Laurent, Daniel et Bernard Moise, Designer sensible
LiftFing Marseille est un grand moment, dont je ne comprends pas toujours pourquoi il n’y a pas plus d’entreprises petite ou grande, d’acteurs territoriaux ou plutôt je ne le comprends que trop bien. Je crois que le défi, notre défi est d’ouvrir cet événement à plus de monde… Je les invite à venir rencontrer, échanger et voir les questions, les pistes qui éclairent ce que nous aurons à faire demain. Chef d’entreprise, Marketeur, Chef de projet, resp de Bureau d’étude, venez travailler avec nous…
Lift by Fing est un creuset incontournable de perception des évolutions et des mutations de la société française dans un monde ou nous sommes plutôt isolés… C’est un risque, échangeons et faisons-en un atout… A vous voir à Lift 2012
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