Après-demain, le débat reprendra à l’assemblée nationale sur la loi HADOPI. Il est rare qu’une loi en aussi piteux état soit présentée au Parlement. Non seulement il l’a déjà rejetée, mais depuis, le moins qu’on puisse dire est que, même dans la majorité, on ne se bouscule pas au portillon pour la soutenir. Le parlement européen vient pour la cinquième fois en un an de voter un texte qui exige qu’on s’abstienne des mesures que prévoit l’HADOPI et les déclare contraire aux droits fondamentaux. Face à cela, le président de la république convoque quelques amis artistes à lui présenter solennellement leur soutien, la ministre de la culture affirme que non la loi n’est en rien contraire aux droits fondamentaux puisque le parlement a voté que l’internet n’était pas un droit fondamental (le parlement européen a lui dit que l’accès à internet était la condition de l’exercice pratique des libertés et droits fondamentaux, ce qui est d’une autre tenue). On a même ressorti les amalgames et omissions de Pascal Nègre, qui présente la licence globale (il insiste pour parler d’une proposition de 2005) comme conduisant à la culture nationalisée, façon de reconnaître sans doute que ce qu’il craint le plus est justement qu’elle soit dans les mains de tout un chacun. En matière de culture nationalisée, il s’y connaît puisqu’il obtient de l’Etat une loi tous les 3 ou 4 ans, un vrai acharnement thérapeutique.

La montée des alternatives est plus impressionnante encore que l’effondrement des soutiens. On s’aperçoit jour après jour que face à l’obsession de la guerre au partage, il y a une toute une gamme de modes d’organisation de la relation entre économie et culture qui sont compatibles avec ce partage. Grâce au courage et à la vision de quelques-un(e)s, des acteurs du cinéma (réalisateurs, acteurs, producteurs), font savoir, après des signaux passés inaperçus provenant des étudiants de la FEMIS et la neutralité remarquée du rapport du Club des 13, que le cinéma aussi est compatible avec les libertés. Demain, à l’assemblée nationale, une coalition d’artistes, de groupes d’internautes et de représentants de consommateurs va appeler une fois de plus à rejeter l’HADOPI et à organiser le débat de tous sur les solutions qui respectent à la fois les libertés et le souci d’une rémunération et d’un financement équitables de la création. Cela suffira-t-il ? Pour faire rejeter l’HADOPI qui sait ? Mais pour maintenir ouverte la porte du futur que les obscurantistes de la rareté culturelle veulent fermer, pas de doute : nous tenons le bon bout.

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