Paris 2024, médaille d’or du design

Les JO de Paris 2024 auront permis de mettre en lumière les rôles clés et la richesse du design en France.

La perception du design en France est trouble. Le design est une sorte de banquet d’Astérix indiscipliné, confus et brillant. Chacun s’y définit par rapport à ce qu’il pense dans de nombreuses oppositions artificielles entre marché et secteur académique, secteur public et secteur privé, intérêt des entreprises et intérêt général, ou entre, simplement, design populaire et design de pointe.
Il est étonnant qu’une discipline dédiée à l’identité arrive si peu à définir la sienne. Etonnamment, Les Jeux Olympiques de Paris 2024 nous ont offert une lecture du design claire, utile et appréciée.

Design de Communication
Depuis les années 1980, les agences de communication et de « branding », liées aux tentaculaires groupes français du secteur, ont asséché la diversité du design en France. Elles l’ont placé dans une approche du présent plutôt triste. Exception à ce constat : l’agence W Conran Design, cofondée par Gilles Deléris, a créé les éléments visuels parmi les plus emblématiques des Jeux : la mascotte Phryge, les icônes « héraldiques » des disciplines et les illustrations colorées inspirées des années 1930.
Leur approche érudite, ancrée dans le patrimoine culturel français, a su fédérer la diversité des sites et des parcours dans une unité visuelle cohérente et unique, mais surtout populaire. Garant de la cohérence, Joachim Roncin, directeur du design des Jeux, a relevé les défis quotidiens de l’événement. Un travail souvent invisible mais toujours indispensable, démontrant l’importance cruciale du design intégré.

Design d’auteur
Mathieu Lehanneur, représentant du design français de pointe, a marqué les Jeux avec ses créations emblématiques aux références politiques et scientifiques maîtrisées : la torche, les vasques et le ballon olympiques. Son travail s’inscrit dans la lignée des grands designers français qui ont su signer leur époque.

Le poster d’Ugo Gattoni a annoncé l’esprit onirique et joyeux des Jeux. Son accueil polémique restera une injustice, qui confirme l’inculture artistique de certains de nos politiques, et de l’espace médiatique.

La culture du faire
L’atelier Blam, fondé par le designer Aurélien Meyer, incarne la tradition des designers fabricants. La réalisation du cheval métallique pour la cérémonie d’ouverture et de la vasque olympique démontre l’importance des savoir-faire techniques et de la fabrication comme source d’innovation. Des savoir-faire précieux dans un pays qui ne fabrique plus grand-chose.

Design innovant
Enfin, et c’est peut-être le plus intéressant, le département design d’EDF Innovation, animé par des designers tels que Samuel Lacroix, Axel Morales et Guillaume Foissac, a démontré comment le design peut transcender les principes scientifiques et techniques. Leur travail sur la flamme électrique pour le ballon et la vasque olympiques illustre parfaitement cette approche innovante, mettant en avant une décarbonation désirable et poétique dont nous avons le plus besoin.

Les Jeux de Paris 2024 auront ainsi permis de mettre en lumière les rôles clés et la richesse du design en France. Cette joyeuse démonstration pourra aider à clarifier ses rôles. Notamment son potentiel en tant que créateur de valeur et d’innovation pour les entreprises et le pays afin de l’inscrire pleinement dans les défis de notre époque et la reconstruction de la France.

Jean-Louis Frechin est directeur de Nodesign.

Publication originale dans les EchosPublié le 5 nov. 2024  | Jean-Louis Frechin | Économie & société, science & prospective | Innovation | Tribune